Partenariats entre marques: qu’est-ce qu’elles y gagnent?

Cet automne, la brasserie ontarienne Beau’s et le détaillant et producteur de thé David’s Tea ont dévoilé la London Fog, fruit d’un partenariat amorcé en octobre 2018. Cette bière est brassée avec une infusion du mélange de thé Earl Grey crème biologique de David’s Tea, à laquelle de la vanille et du lactose biologique ont été ajoutés afin de recréer la texture d’un Earl Gray latté dans une bière.

Une telle collaboration tombait sous le sens, selon Nathalie Binda, vice-présidente, marketing, de David’s Tea. «Nous sommes innovateurs dans notre domaine et ne nous limitons pas à proposer aux consommateurs des saveurs conventionnelles de thé vert ou noir, ou de camomille. Pour sa part, l’équipe de Beau’s est composée de freaks du goût qui cherchent sans cesse à offrir des produits différents aux consommateurs. Par conséquent, l’association était naturelle, d’autant plus qu’elle nous permet de toucher un public beaucoup plus masculin que le nôtre.»  

Celle qui entrait au poste à la fin de 2018 quand les bases du partenariat ont été jetées n’aurait pas nécessairement donné son aval uniquement pour accoler sa marque sur un gros nom et parasiter sur celui-ci. «Avec Beau’s, nous partageons un grand nombre de valeurs d’authenticité et une volonté de mettre du fun dans le goût. C’est une marque dont le facteur cool s’apparente au nôtre.»

Réinventer le discours 

« Un discours dont la ligne va plus loin que de pousser une marque en vantant ses attributs. »

Pour Nathalie Binda, le désir de créer de l’inattendu représente d’ailleurs une incontournable condition de réussite quand deux joueurs se rassemblent autour d’un projet ou d’un concept. L’experte estime qu’à l’heure du storytelling, de telles collaborations servent à raconter une histoire stimulante et à propager un discours dont la ligne éditoriale va plus loin que de pousser une marque en vantant ses attributs. En plus, elles permettent à une marque de surprendre et d’éviter d’être perçues comme stagnantes. «Quand Adidas s’est associée à la designer Stella McCartney, personne ne s’y attendait.» 

«C’est une façon pour une marque de rester pertinente, de se renouveler et de s’afficher comme cool

Les partenariats entre marques ou entre produits vont habituellement plus loin que le simple volet commercial ou la vente immédiate, estime pour sa part, Martin Beauvais, président de l’agence Open, responsable de la campagne de lancement de London Fog. «Bien sûr, chaque partie va chercher auprès de l’autre des éléments qui lui manquent. Par contre, c’est aussi une façon pour une marque de rester pertinente, de se renouveler et de s’afficher comme cool parce qu’elle apparaît alors comme audacieuse et innovatrice. Le tout sans devoir investir des sommes considérables pour faire connaître un quelconque repositionnement.»

Le spécialiste donne l’exemple du partenariat entre Louis Vuitton et la marque de vêtements de rue Supreme. «Vuitton est une marque haut de gamme, alors que Supreme est populaire auprès des milléniaux. En créant des produits et des vêtements plus jeunes et davantage abordables, Vuitton s’est rapprochée d’un public qui n’était pas le sien au départ. Quant à Supreme, elle jouit ainsi du prestige de sa marque partenaire sans pour autant ébranler la fidélité de ses consommateurs.»

La mode : un secteur propice

L’univers du vêtement est d’ailleurs souvent la scène de collaborations complémentaires de la sorte. Martin Beauvais évoque notamment la marque de fast fashion Uniqlo et son association avec l’étiquette britannique JW Anderson ainsi que les marques canadiennes de bijoux Jenny Bird et de vêtements Smythe

 «IMAGINEZ UNE COLLABORATION ENTRE LE BEURRE D’ARACHIDES KRAFT ET LA POUDRE CHOCOLATÉE NESQUICK.»

Dans ce dernier cas, leur collaboration a engendré un blazer doté d’un accessoire en or oxydé directement inspiré des années 90 et qui se transforme en collier à chaîne lorsqu’il est porté au cou. «Ensemble, nous désirions créer quelque chose d’extraordinaire qui allait reposer sur nos forces respectives», résume une des cofondatrices de Smythe, Andrea Lenczner, sur le site de Jenny Bird. «Smythe est associée à des personnalités comme Kate Middleton et Meghan Markle, rappelle Martin Beauvais. En s’y collant, Jenny Bird ajoute une dimension fort intéressante à sa marque.» 

Invité à se prononcer sur l’avenir des partenariats, le dirigeant souhaite que des initiatives de cette nature se multiplient dans plusieurs autres domaines et même au sein de multinationales. «Personnellement, je rêverais de travailler, par exemple, dans le cadre d’une collaboration entre le beurre d’arachides Kraft et la poudre chocolatée Nesquick. Imaginez les possibilités!»