Revitaliser une marque historique sans la dénaturer

Marie-Claude Fortin

Associée, directrice conseil

La marque internationale laisse une certaine indépendance à chacun des pays où elle déploie des magasins en ce qui a trait à son identité et à son image. C’est dans ce contexte que Le Creuset Canada a rencontré Polygraphe, avec une volonté de faire évoluer son image.

« Elle souhaitait injecter une touche de premium, mais aussi de la constance et de la rigueur dans leurs outils de communication », explique Marie-Claude Fortin, associée, directrice conseil à Polygraphe.

Par « premium », elle entend notamment de rappeler aux milléniaux, lesquels détiennent un plus grand pouvoir d’achat de nos jours, qu’elle compte parmi sa collection des produits de luxe. « Sa clientèle plus jeune était exposée à la marque au moyen des accessoires moins chers, mais désiraient que la cocotte, un de ses produits phares, devienne un de ses premiers achats », souligne Sébastien Bisson, associé, directeur de création du studio.

Comme la marque faisait déjà très bien les choses, de l’avis du studio montréalais, c’est dans les détails que des améliorations pouvaient être apportées. « Peu importe le point de contact avec la clientèle, la marque devait s’exprimer d’une même voix, que tu te rendes à une boutique Le Creuset ou en ligne, ou que tu reçoives leurs produits par la poste, ajoute-t-il. C’est à ce niveau qu’on a vu que l’on pouvait intervenir. »

sébastien bisson

associé, directeur de création

L’importance de rester pertinent

Si le premier réflexe de Polygraphe était d’aborder le produit en mettant l’accent sur le fait qu’il durait d’une génération à l’autre, Polygraphe a plutôt choisi de faire un pas en arrière et de passer en mode écoute et expérience.

« En allant visiter certaines boutiques, on s’est aperçu que la marque n’était pas du tout ancrée dans le passé, et je veux dire par là qu’elle renie son héritage, mais que ce qui nous a frappés le plus, c’est qu’elle regarde beaucoup vers l’avant et la façon dont elle peut améliorer ses produits ou en proposer de nouveaux », affirme Marie-Claude Fortin.

Ainsi, les boutiques revêtent un esthétisme très moderne et coloré, ce qui a surpris l’équipe et changé sa perception puisque son expérience de la marque était teintée davantage des campagnes qu’elle avait vues au fil du temps. « C’est le côté champêtre qui ressortait principalement de celles-ci et son héritage alors que lorsque tu es face au produit dans les boutiques, c’est tout l’inverse, c’est lui qui est mis en évidence », soutient Sébastien Bisson.

De là s’est amorcé tout un travail de collaboration avec Le Creuset, pour bien positionner la marque et ce qu’elle signifie aujourd’hui. Les premiers six mois ont été entièrement consacrés à l’immersion, la recherche et la définition des grandes lignes, de même que l’analyse des différentes plateformes.

« Ce temps était nécessaire pour bien comprendre et respecter l’héritage sans la brusquer et prétendre avoir tout saisi et vouloir tout changer », soutient l’associée de Polygraphe.

edith morin

directrice artistique et designer

Durant la première année, l’équipe s’est attardée à l’évolution de la papeterie, du site web, de l’infolettre, de l’emballage des produits, de la signalétique et l’affichage en boutique, du guide de normes, de même que la nouvelle approche du magazine.

« Le magazine auparavant était davantage un catalogue et a complètement changé de visage, notamment son nom, mais aussi les histoires qui y sont racontées, les détails sur les produits et la manière de les présenter, avec de grandes images », mentionne Edith Morin, directrice artistique et designer. 

Un travail récurrent est aussi effectué tous les trois mois sous forme de thématique, et se décline dans le magazine, les annonces, les réseaux sociaux, le web et en boutique. 

Quoi laisser aller, quoi garder

Polygraphe n’a pas changé au logo, ni à la couleur orange appelée Flame. « C’était, selon nous, des intouchables, de grands classiques qui étaient profondément ancrés dans les esprits », mentionne Sébastien Bisson.

L’héritage autour du produit, soit son esthétisme, sa durabilité et sa qualité, a été embrassé par l’équipe pour propulser la création. « C’est une célébration de l’objet, à tous les niveaux, résume Marie-Claude Fortin. On ne croit pas qu’il faut toujours faire table rase et réinventer à chaque fois, surtout quand un héritage est positif comme celui de Le Creuset. »

Dans les communications, le ton de la marque devait aussi être respecté, lequel se décrirait comme étant confiant, mais jamais hautain. « On l’a seulement actualisé à certains égards pour parler à une clientèle plus large », précise-t-elle.

L’image de marque mise à jour a été réfléchie également de manière à être pérenne : couleur, logo, grille graphique et mise en page. Bref, tout ce qui touche à l’enveloppe de l’identité.

« L’expression photographique, qui prend une grande place, devra toutefois être remis au goût du jour au fil des saisons, des nouveaux produits et de leurs caractéristiques, mais tout en gardant les bases solides », précise Edith Morin.

Ces « fondations » se traduisent par des compositions graphiques et épurées, des décors sobres et immaculés avec certains niveaux de couleur, mais qui s’éloignent de la cuisine. C’est Virginie Gosselin qui signe les photographies.

« On tourne trois grosses séances de photographie par année et à chacune, on fait de petits pas pour apporter des éléments nouveaux, toujours dans cette intention de progresser », affirme Sébastien Bisson.