COVID-19: quels comportements les marques doivent-elles adopter?

«Aujourd’hui, nos clients se posent beaucoup de questions, notamment sur leurs investissements. Chez Sid Lee, nous préparons des réponses adaptées, mais réfléchissons surtout à la mise en place de stratégies pertinentes sur le long terme pour faire valoir les missions d’entreprise», dit Pauline Rosen, vice-présidente stratégie de Sid Lee. 

Soyez utiles

«Il faut penser à ses consommateurs de manière à se rendre utile.»

«Les gens commencent à être stressés, déstabilisés par les annonces, les reports et les annulations. Tout à coup, personne ne sait ce qu’il faut faire. En tant que marque, il faut penser à ses consommateurs de manière à se rendre utile.

De nombreux vols sont annulés dans le monde, les interdictions de rassemblements se multiplient, les directives sont plus ou moins claires, parfois très subjectives. Aux marques de s’adapter. Pour les compagnies aériennes, une bonne pratique est de proposer de meilleures politiques d’annulation ou de remboursement. Pour les détaillants, les ventes risquent de basculer sur le e-commerce. Dans ce contexte, les entreprises peuvent rendre disponibles leurs employés en service à la clientèle en ligne. Pour les agences immobilières, des solutions peuvent être mises en place pour créer des visites à distance.

Quelle que soit la situation, les entreprises doivent identifier des leviers pour être utiles en fonction de leur industrie et de leur mission d’entreprise.»

Doublez la mise sur les communautés

«Le sentiment d'isolement va s'accentuer.»

«Depuis plusieurs années, nous constatons un sentiment de solitude dans le monde. Un Canadien sur cinq se sent seul. Dans le contexte actuel, le sentiment d’isolement va certainement s’accentuer. Dans le même temps, nous voyons naître une forme de racisme vis-à-vis de certaines personnes et communautés.

Comment les marques peuvent, dans une période d’isolement, créer un sentiment d’appartenance, aider à connecter les gens? Des structures comme les maisons de retraite doivent s’interroger sur ces questions, elles qui ont un public particulièrement touché par la solitude. Les entreprises technologiques peuvent également se manifester pour mettre en place des outils facilitant la connexion virtuelle dans certains endroits. Enfin, côté restauration, peut-être que les établissements asiatiques vont subir une baisse de fréquentation. Des solutions peuvent être mises en place pour créer des événements spéciaux pour redonner de la visibilité à ces structures.»

Embrassez l’ennui

«Les opportunités viennent de l’insight humain.»

«En quarantaine, les gens s’ennuient. On le voit dans les comportements : les marques de contenus tirent leur épingle du jeu, l’utilisation de services comme Netflix augmente sensiblement.

Les entreprises doivent se questionner pour créer du divertissement, empêcher les gens de s’ennuyer. Les services de livraison de plats cuisinés peuvent mettre en place des opérations de communication pour inciter les gens à dîner ensemble, les artistes qui voient leurs tournées annulées peuvent organiser des concerts en ligne, les sites de rencontres peuvent miser sur des rencontres virtuelles… Par ailleurs, les marques peuvent créer des compétitions entre amis. Une boulangerie peut mettre en place un concours sur les médias sociaux pour réaliser le meilleur gâteau!

Les opportunités viennent de l’insight humain. Les marques doivent penser à leurs consommateurs, à ce dont ils ont besoin, à leur quotidien.»

Soyez généreux

«Shopify donne 1 000 dollars à chaque employé pour qu'il puisse s'équiper à travailler de chez lui.»

«Une crise induit des répercussions financières, pour les entreprises comme pour les citoyens. L’instabilité règne. Aux marques de se montrer généreuses envers leurs clients, leurs employés et leurs partenaires.

Un conseiller financier peut proposer ses services pour aider les entreprises à mettre en place une stratégie financière, les banques peuvent, quant à elles, relever le plafond de leurs frais bancaires. Les sites de livraisons de repas ou de booking peuvent apporter leur soutien aux entreprises en allégeant leurs commissions. C’est un geste citoyen envers leurs partenaires.

Par ailleurs, Shopify a demandé à ses 5 000 employés dans le monde de travailler de la maison et d’annuler leurs voyages d’affaires et conférences. Pour faciliter la transition vers le télétravail, l’entreprise offre une allocation de 1 000 dollars à chaque employé pour acheter toutes les fournitures de bureau nécessaires.»

Pensez local

«L'actualité va influencer les comportements d’achat.»

Le contexte de pandémie est différent selon la zone géographique. C’est la même chose pour les populations. Une marque ne peut pas avoir un seul message global, il y a une notion de localisation dans les messages et les actions à mettre en place.

Cette actualité va influencer les comportements d’achat. Les gens vont avoir tendance à acheter plus local, à être plus sensibles à la provenance des produits.

Bien entendu, Amazon ne va pas cesser d’exister, mais cette notion de proximité vis-à-vis de la consommation globale va revenir dans les discussions.

Après une entente financière de 15 ans, le bailleur de fonds de Groupe Maurice, Ipso Facto, l’a en quelque sorte acculé au pied du mur. Si l'entreprise ne voulait pas mourir, elle n’avait d’autres choix que de trouver un autre investisseur en cinq semaines. Un ultimatum qui a déclenché un véritable branle-bas de combat parmi les membres de la direction.

Rita Kataroyan

Le groupe maurice

Malgré cette quête vitale pour la survie de l’entreprise, le Groupe Maurice a traité ses communications internes comme dans d’autres situations, c’est-à-dire avec transparence.

«Une erreur que les entreprises font parfois, c’est de donner trop d’importance aux communications formelles au détriment des messages informels du quotidien, souligne Rita Kataroyan, vice-présidente, ventes et marketing. Les messages formels devraient seulement venir confirmer tout le travail de communication effectué chaque jour.»

Elle mentionne en effet qu'il aurait été naïf de penser que les employés ne soupçonneraient pas que quelque chose se tramait, avec tous les membres de la direction qui étaient mobilisés sur le projet, donc moins présents. «Dès le début, on leur a rappelé que notre entente financière arrivait à échéance et que, contrairement aux autres renouvellements – quatre au total –,  nous devions changer de partenaire, explique-t-elle. Devant l’inconnu, il est normal que les gens soient préoccupés.»

«Les entreprises donnent parfois trop d’importance aux communications formelles au détriment des messages informels au quotidien.»

Des efforts importants ont alors été déployés pour rassurer les équipes et leur dire que la notoriété et le potentiel de l’industrie attiraient bon nombre d’investisseurs. «Nous avons souligné que le futur partenaire respectera et encouragera les éléments de différenciations et les valeurs de transparence et d’honnêteté qui ont mené à notre succès.»

Communiquer dans le «blanc des yeux»

Rita Kataroyan estime que le succès des communications liées à ce changement a reposé davantage sur la manière plutôt que sur le message.

«C’est bien beau d’envoyer un message formel signé par le président, mais il faut l’adresser tout de suite après dans chacune des équipes, qui ont des préoccupations différentes selon leurs fonctions.»

En effet, avec 2 000 employés et 35 sites, les messages ne sont pas les mêmes pour tous, notamment entre le personnel du siège social et celui en résidence. «On a fourni un document de type Foire aux questions (Q&A) à chacun des supérieurs immédiats en anticipant les questions que les gens oseraient leur poser seulement à eux, notamment les répercussions sur leur quotidien.»

Anticiper les inquiétudes après l’annonce

De nouvelles préoccupations sont nécessairement nées à la suite de l’annonce du nouveau partenaire : «Est-ce que la culture de l’entreprise changera?», «Est-ce qu’il y aura des suppressions de postes?», etc.

Les communications réitéraient à cette étape ce qui avait déjà été dit, en plus de mettre en lumière les raisons qui motivaient le choix du nouveau partenaire. «D’autres investisseurs avaient manifesté leur intérêt, rappelle Rita Kataroyan. Mais la société publique Ventas était le meilleur choix parce que ses valeurs et sa culture respectaient les nôtres.»

«Nous avions surestimé la compréhension des concepts d’affaires.»

Certaines inquiétudes avaient bien été anticipées, comme celles entourant la vente à un joueur américain. Un autre Q&A avait été préparé et communiqué, expliquant bien que la décision visait à assurer la survie de l’entreprise québécoise. «Oui, ils sont Américains, mais peu importe d’où vient l’argent, au moins on a désormais les sommes nécessaires pour améliorer le bien-être des aînés québécois et continuer à créer des emplois dans la province, soutient-elle. Et que ce soit une société publique, qui est partenaire avec plus de 200 entités comme nous partout dans le monde, nous donne une forme de garantie de pérennité dans l’avenir.»

D’autres questions ont pris plus de court la direction, comme celle entourant la composante affaires de la transaction. «Nous avions surestimé la compréhension des concepts d’affaires, autant de la part des employés que du public. Nous avons donc dû ajuster le tir pour bien les conscientiser sur ces aspects.»

Plusieurs étaient en effet surpris que Ventas devienne partenaire majoritaire à 85%, comme si c’était un élément nouveau. Or, le Groupe Maurice n’a jamais été propriétaire unique de tous ses bâtiments, qui valent trois milliards de dollars, une somme impossible à soutenir seul.

De plus, Luc Maurice, le fondateur, ne pouvait se déplacer en personne dans toutes les résidences pour expliquer la transaction. Il s'est donc exprimé dans un message vidéo qui a été projeté en boucle dans les différents emplacements pour que résidents, employés et familles soient informés de «première main».

Les autres membres de la direction, qui «parrainent» chacun quelques résidences, ont également multiplié les visites en prenant le temps d'apaiser les gens. «Ils se sentent rassurés lorsqu’ils obtiennent des réponses en nous regardant dans les yeux, même s’ils ont déjà reçu les informations par un autre moyen de communication. Là, ils voient notre confiance et notre honnêteté.»

Mais, de l'avis de Rita Kataroyan, c'est la continuité qui calmera définitivement les insécurités des employés et résidents. «On a beau dire que ce rachat ne changera pas, nos messages ne seront totalement crédibles que lorsque les employés et les résidents le constateront d’eux-mêmes, au quotidien.»